fondé en titre ou non ?
Cour Administrative d’Appel de Bordeaux 23 octobre 2003
Considérant que, par jugement en date du 23 juin 1999, le tribunal administratif de Pau a annulé l’arrêté en date du 18 septembre 1998 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques avait, sur le fondement de l’article 41 du décret susvisé du 29 mars 1993, reconnu le droit fondé en titre attaché au moulin d’Araujuzon sur le Lausset et prescrit à son propriétaire, M. X, différentes mesures d’exploitation de l’ouvrage ;
que les circonstances que le moulin d’Araujuzon ne soit plus exploité depuis plus de cinquante ans et n’ait pas fait l’objet d’un entretien continu, le rendant ainsi impropre à sa destination, n’impliquent pas nécessairement une renonciation de la part des propriétaires successifs, au cours de cette période à se prévaloir d’un fondement en titre du moulin alors que la renonciation à un droit ne se déduit pas de la seule inaction de son titulaire et ne peut résulter que d’actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ;
que, par suite, c’est à tort que, le tribunal administratif de Pau s’est fondé sur l’état de délabrement et l’inexploitation durant plus de cinquante ans du moulin d’Araujuzon pour écarter le droit fondé en titre attaché audit moulin et annuler l’arrêté précité du préfet des Pyrénées-Atlantiques ;
Considérant, toutefois, qu’il appartient à la cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par la fédération des Pyrénées-Atlantiques pour la pêche et la protection de l’environnement du milieu aquatique et par l’association du gave d’Oloron pour la pêche et la protection du milieu aquatique devant le tribunal administratif de Pau ;
Considérant que si des extraits d’un acte de mariage antérieur à 1789 évoquent bien la présence d’un moulin sur le territoire de la commune d’Araujuzon, l’absence de localisation précise de celui-ci ne permet pas de considérer qu’il s’agit du moulin acquis par M. X ;
que les pièces produites par ce dernier, de par leur grande imprécision, ne suffisent pas, non plus, à établir l’existence du moulin de M. X antérieurement à l’abolition des droits féodaux en 1789 ;
qu’ainsi aucun droit fondé en titre ne peut être attaché audit moulin ;
que, par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen de la demande, l’arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques en date du 18 septembre 1998 est illégal et doit être annulé ;
D E C I D E
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la fédération des Pyrénées-Atlantiques pour la pêche et la protection de l’environnement du milieu aquatique et de l’association du gave d’Oloron pour la pêche et la protection du milieu aquatique tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Commentaire lu sur http://texteau.ecologie.gouv.fr:
La question sous-jacente à cet important arrêt était de déterminer si un droit fondé en titre est ou non susceptible de se perdre du fait d’ un « non-usage », c’ est-à-dire au terme d’ une action passive des propriétaires successifs qui se sont abstenus d’ entretenir l’ ouvrage rendant l’ installation impropre à sa destination. La réponse à la question est négative du fait même du caractère perpétuel du droit dont la disparition ne peut résulter que d’ un acte volontaire et sans équivoque de renonciation ou encore d’ un acte de révocation par l’ administration exercé au nom de l’ intérêt général dans le cadre de la police de l’ eau avec ou sans indemnité selon que l’ ouvrage est implanté sur un cours d’ eau domanial ou un cours d’ eau non domanial (v. TA Rennes, M. SABLE, n° 97-3257 et TA Besançon 17 avril 2003 Société Hydroélec n° 01-0943, Panorama n° 6 p. 26). Seul est susceptible de se perdre, du fait de l’ inaction de son titulaire, un éventuel droit à indemnisation en cas d’ atteinte portée par le titulaire à un autre droit d’ eau concurrent.