Guy Dupuy / Michel Des Accords - Mars 2006
Une action judiciaire peut en cacher une autre
Le 1° septembre 2003, deux pêcheurs à la ligne venaient en barque pêcher dans le canal de fuite d’un moulin fondé en titre (antérieur à l’Edit de Moulins du 13 mai 1566) équipé de trois turbines produisant de l’électricité sur un cours d’eau domanial.
Le propriétaire s’en étant aperçu, vient voir les pêcheurs en leur demandant de quitter les lieux qu’ils n’auraient jamais du investir ne serait-ce qu’à cause des très grandes chaleurs que la France avait connues les jours précédents. Les pêcheurs deviennent arrogants, le ton monte et le propriétaire du moulin fait ce qu’il n’aurait jamais du faire pour notre plus grand profit comme nous le verrons plus loin. Il jette des cailloux dans la barque au point de casser (!) pour 2 037 euros de lignes, du moins c’est ce qui a été avancé dans le jugement condamnant lourdement le propriétaire à 1 400 euros de dommages et intérêts, assorti d’un mois de prison avec sursis, plus un euro à titre de dommages et intérêts à la Fédération de Pêche qui s’était constituée partie civile. Pour corser le tout, le propriétaire se présente seul devant les gendarmes puis devant le tribunal, ne comprend pas que le juge fait partir le délai d’appel de l’audience même, laisse passer les délais : la condamnation est définitive. Voire, le propriétaire téléphone à la Veille Juridique des Riverains.
Cette dernière conseille une consultation "assistée", c’est à dire en présence d’un des animateurs de la Veille Juridique des Riverains, avec un avocat pratiquant le droit de riveraineté et les droits d’eau des moulins. Prenant appui sur le jugement accablant prouvant la violation du droit de propriété, une action civile est intentée avec succès contre les deux pêcheurs. Il est établi que le canal de fuite, tout comme le canal d’amenée, appartient bien au moulin en vertu de l’article 546 du code civil définissant le droit d’accession. L’avocat relève bien que le procès verbal des protagonistes lors du premier procès cite les paroles mêmes des pêcheurs affirmant avoir été "sur l’eau, ni ancré, ni amarré, sur le canal de fuite …"
Il insiste sur l’article 546 précité et produit l’arrêt de la Cour d’Appel de Caen de septembre 2004 : "Le propriétaire d’un moulin est, compte tenu des titres présentés, propriétaire du canal de fuite dans toute sa longueur et sa largeur et dispose d’un droit d’eau …"
Par ces motifs la Juridiction de proximité a condamné solidairement les deux pêcheurs à payer 1 000 euros au propriétaire du moulin, augmentés de 500 euros au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et à payer solidairement les dépens.
Ce jugement satisfaisant, nous oblige à signaler le danger couru par les pêcheurs, lors des lâchers d’eau qui se font de manière imprévisible parce que commandés par un système automatique.
Guy Dupuy / Michel Des Accords - Mars 2006