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Publié : 1er mars 2013

Travaux ayant causé des dommages à une micro-centrale (2000)

Cour administrative d’appel de Bordeaux 22 décembre 2000

Sur les conclusions principales :

Considérant, en premier lieu, qu’en se bornant à affirmer à l’appui de sa demande d’annulation de la décision du préfet de l’Hérault du 20 juillet 1990 et de la décision implicite du président du conseil général de l’Hérault, que les travaux de consolidation exécutés au pont de Florensac apparaissent tout à fait inadaptés ou tout au moins superflus, la société requérante n’établit pas que le refus de ramener de 4,20 m à 3,46 m le seuil de ce pont serait entaché d’une erreur manifeste d’appréciation ;

...

Sur les conclusions incidentes concernant la responsabilité :

Considérant qu’il résulte de l’instruction, et sans qu’il soit besoin d’ordonner une nouvelle expertise, que, contrairement à ce que prétend le département de l’Hérault, le préjudice anormal et spécial dont se prévaut la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY est en relation directe de cause à effet avec la réalisation des travaux de protection du pont de Florensac dont il est propriétaire, travaux qui ont eu pour effet d’entraîner un relèvement du niveau des eaux en amont et, par suite, un abaissement de la hauteur de chute de la centrale électrique ;

que, dès lors, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la responsabilité du département, propriétaire de l’ouvrage public, était engagée sur le terrain de la responsabilité sans faute ;

que le département ne saurait s’exonérer de sa responsabilité envers l’exploitante en invoquant le fait de tiers ou la force majeure qui n’est pas établie en l’espèce ;

que la circonstance que la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY ne s’est pas manifestée lors de l’enquête hydraulique préalable à la délivrance de l’autorisation de réalisation des travaux dont il s’agit, alors qu’elle avait été informée de cette enquête, n’est pas, dans les circonstances de l’espèce, constitutive d’une faute de nature à atténuer la responsabilité du département ;

que l’affirmation selon laquelle l’exploitante procéderait à une utilisation anormale de sa centrale aboutissant à une surproduction à l’origine du préjudice, n’est pas démontrée ;

que les travaux litigieux ayant été réalisés dans l’intérêt de la circulation routière, ni l’article 109 du code rural ni l’article 21 du règlement d’eau du 27 mars 1987 ne sauraient avoir pour effet de priver la société exploitante de toute indemnisation ;

Considérant que seul l’ouvrage public, par sa présence, cause un dommage permanent à la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY ;

qu’en l’absence d’un lien de causalité direct entre ce dommage et l’action régulière des services de l’Etat, la responsabilité de ce dernier ne peut être engagée ;

que le département de l’Hérault, maître de l’ouvrage, doit, dès lors, être déclaré seul responsable dudit dommage ;

qu’il suit de là que le ministre de l’environnement est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a déclaré l’Etat solidairement responsable avec le département de l’Hérault des conséquences dommageables pour la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY de l’établissement d’un ouvrage de protection du pont de Florensac comportant l’installation d’un seuil ;

qu’il y a lieu de réformer sur ce point le jugement et de rejeter la demande de la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY en tant qu’elle est dirigée contre l’Etat ;

Sur les conclusions à fin d’injonction présentées par le département de l’Hérault :

Considérant qu’il n’appartient pas à la cour d’enjoindre à la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY de produire les caractéristiques techniques de la centrale ;

Sur l’application des dispositions de l’article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY et l’Etat, qui ne sont pas perdantes dans la présente instance, soient condamnés à verser au département de l’Hérault une somme au titre des frais non compris dans les dépens que celui-ci a engagés ;

qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner le département de l’Hérault à verser à la société Razel Frères la somme de 6 000 F en application de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le département de l’Hérault est déclaré seul responsable du préjudice subi par la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Montpellier par la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY, en tant qu’elle tend à mettre en jeu la responsabilité de l’Etat, est rejetée.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 25 octobre 1995 est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : La requête de la SOCIETE DU MOULIN DE SAINT-THIBERY et les conclusions du département de l’Hérault sont rejetées.

Article 5 : Le département de l’Hérault versera 6 000 F à la société Razel Frères en application de l’article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.


Si les travaux de protection réalisés sur un pont ouvrage public départemental soit à l’ origine de l’ abaissement de la hauteur de chute d’ une micro-centrale et donc d’ un préjudice anormal et spécial pour son exploitant du fait d’ une moindre production énergétique, aucun lien de causalité directe, ne peut être prouvé entre ce dommage et l’ action (régulière) des services de l’ Etat. La responsabilité du département ne saurait être atténuée par le fait que l’ exploitant de la micro-centrale ne s’ était pas manifesté lors de l’ enquête publique préalable aux travaux.