Cour administrative d’ appel - 8 octobre 2007
Considérant que les requérants font appel du jugement du 7 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à ce que la commune de la Salle-les-Alpes soit condamnée à verser à chacun une somme de 1 500 euros en réparation du préjudice moral résultant du débordement du torrent du Bez survenu le 24 juillet 2005 ;
En ce qui concerne l’ exercice des pouvoirs de police du maire :
Considérant en premier lieu, que par une première délibération en date du 20 décembre 1993, le conseil municipal de la commune de la Salle-les-Alpes a donné son accord de principe pour la mise en oeuvre d’ un programme pluriannuel de protection des berges de certains torrents de la Salle-les-Alpes contre les risques naturels ;
que le même conseil a, dans une deuxième délibération en date du 7 avril 1995, proposé de confier la maîtrise d’ oeuvre desdits travaux de protection des berges à la direction départementale de l’ agriculture et de la forêt, à l’ ONF, ainsi qu’ au service de restauration des terrains en montagne ;
que s’ il est vrai qu’ aucune de ces deux délibérations ne mentionne expressément le torrent du Bez, il résulte néanmoins de l’ instruction, que la délibération susmentionnée du 20 décembre 1993 qui ne concernait que la première tranche de travaux à effectuer en fonction d’ un ordre des priorités établi par un rapport des services de restauration des terrains en montagne, renvoyait audit rapport dans lequel le torrent du Bez figurait en troisième position ;
que par suite, le Tribunal n’ a pas commis d’ erreur de fait en considérant que la commune de la Salle-les-Alpes avait, antérieurement à la crue du Bez du 24 juillet 1995, décidé d’ un programme de protection contre les débordements dudit torrent ;
Considérant en second lieu, qu’ aux termes de l’ article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : « La police municipale a pour objet d’ assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique. Elle comprend notamment : …5º Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels, les maladies épidémiques ou contagieuses, les épizooties, de pourvoir d’ urgence à toutes les mesures d’ assistance et de secours et, s’ il y a lieu, de provoquer l’ intervention de l’ administration supérieure » ;
Considérant que la commune de la Salle-les-Alpes, située en zone de montagne, comporte sur son territoire plusieurs cours d’ eau en forte pente, dont celui du Bez, pour lequel elle avait décidé, ainsi qu’ il a été dit plus haut, un renforcement des berges que la crue du 24 juillet 1995 ne lui a pas permis de mettre en oeuvre ;
que par le passé, le hameau du Bez avait déjà connu, à deux reprises, des inondations dues au débordement du torrent du même nom ;
qu’ il ne saurait être reproché pour autant au maire, de ne pas avoir, au vu de ces précédents datés de 1955 et 1973 dont ni la localisation exacte ni l’ ampleur réelle ne ressortent précisément des pièces du dossier, donné la priorité au torrent du Bez dans le programme de protection des berges susmentionné et par suite de ne pas avoir entrepris les travaux susceptibles de prévenir les effets de la crue du 24 juillet 1995, au demeurant qualifiée de « catastrophe naturelle » par un arrêté publié au journal officiel de la république française du 8 septembre 1995 ;
qu’ il ne saurait lui être davantage reproché de ne pas avoir averti spécialement la population du hameau sinistré, alors que les risques étaient connus de tous et que, compte tenu de la multiplicité des facteurs qui conditionnent les crues torrentielles en montagne, il ne pouvait envisager la survenance d’ une crue du Bez avec un degré de probabilité suffisant ;
que dans ces conditions, le maire de la commune de la Salle-les-Alpes ne peut être regardé, ainsi que l’ a jugé le tribunal administratif, comme ayant fait preuve, dans l’ exercice de ses pouvoirs de police, d’ une carence constitutive d’ une faute lourde, seule de nature à engager, en matière de lutte contre les inondations, la responsabilité de la commune ;
En ce qui concerne la responsabilité du fait d’ un ouvrage public :
Considérant que les requérants mettent également en cause le rôle, dans la survenance des dommages, d’ un pont enjambant le torrent du Bez et situé en amont du hameau, lequel aurait retenu des troncs d’ arbres et blocs rocheux charriés par le torrent et ainsi contribué à dévier la lave torrentielle vers l’ immeuble leur appartenant ;
que même si ledit ouvrage n’ était pas, comme l’ ont indiqué les premiers juges, situé à un coude du lit du torrent, mais en aval de ce dernier, la configuration très en pente des lieux, la coulée de boue très active le jour de l’ événement, de même que la nature très dure de la roche, ont pu indépendamment même de la présence et de la localisation exacte du pont litigieux, constituer autant de facteurs propices au débordement du torrent ;
qu’ il résulte en outre de l’ instruction que la présence à cet endroit de ce pont dont au demeurant l’ entretien n’ est pas mis en cause, destiné à assurer la protection des skieurs en facilitant leur passage au dessus du torrent en fin de piste, présentait une utilité certaine ;
que par suite, au vu de cet élément, et en l’ absence de lien de causalité déterminant et clairement établi entre l’ ouvrage public en question et les dommages subis par les requérants, la responsabilité sans faute de la commune de la Salle-les-Alpes ne saurait être, ainsi que l’ a jugé le tribunal administratif, engagée envers les requérants ;
Considérant qu’ il résulte de tout ce qui précède que M. X et autres ne sont pas fondés à soutenir que c’ est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. X et autres est rejetée.