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Publié : 12 janvier 2013

La commune ayant délégué l’entretien de la rivière est incompétente pour fixer les participations des riverains (2005)

Cour administrative d’appel de Douai 15 juillet 2005

M. X. demande

1°) d’annuler le jugement n° 0100827 du 21 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande qui tendait à l’annulation des délibérations en dates des 30 mars 1998, 7 février 2000 et 12 janvier 2001 par lesquelles le conseil municipal de la commune de Breux-sur-Avre a réparti sur les propriétaires riverains le coût d’une partie des travaux de réaménagement de la rivière Avre au lieu-dit l’Auget ;

Il soutient qu’en faisant supporter le coût des travaux par certains propriétaires riverains, la commune a méconnu le principe d’égalité devant les charges publiques ;

que la rivière Avre appartenant au domaine public fluvial, la contribution exigée des propriétaires ne peut être prise qu’aux termes d’une procédure qui n’a pas été respectée ;

que la commune n’ayant pas prescrit et exécuté les travaux, elle ne pouvait imposer une participation à leur coût ;

qu’il serait inéquitable de lui laisser supporter les frais de l’instance ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 février 2005, présenté pour la commune de Breux-sur-Avre, par Me Baron, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. Jean-Pierre X à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

la commune soutient qu’elle peut mettre le coût des travaux à la charge de toute personne y trouvant intérêt ;

que l’Avre n’appartient pas au domaine public ;

qu’elle prescrit elle-même les travaux dont s’agit ;

qu’il serait inéquitable de lui laisser supporter les frais de l’instance ;

Vu le mémoire en réplique, reçu par fax et enregistré le 24 mars 2005 et son original enregistré le 29 mars 2005, présenté pour M. Jean-Pierre X qui persiste dans ses conclusions ;

il soutient que le jugement attaqué a omis le moyen tiré de la rupture d’égalité devant les charges publiques ; que la longueur de la propriété des riverains n’est pas un critère pertinent pour déterminer le montant de leur participation ;

qu’il n’existe aucun intérêt général de nature agricole ;

que l’enquête publique ne mentionne pas la répartition des charges ;

que les travaux sont extérieurs à la déclaration d’intérêt général ;

qu’il n’a pas intérêt à ces travaux ;

Vu la lettre en date du 11 mai 2005 par laquelle le président de la formation de jugement a informé les parties qu’en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative la décision à intervenir est susceptible d’être fondée sur un moyen soulevé d’office ;

Vu le mémoire, reçu par fax et enregistré le 24 mai 2005 et son original enregistré le 25 mai 2005, présenté pour M. Jean-Pierre X qui déclare se désister de ses conclusions d’annulation de la délibération en date du 30 mars 1998 ;

il soutient qu’il invoque son illégalité par la voie de l’exception ; qu’elle n’a été ni publiée ni transmise au contrôle de légalité ;

Vu le mémoire en réponse, enregistré le 25 mai 2005, présenté pour la commune de Breux-sur-Avre qui persiste dans ses conclusions ; elle soutient qu’aucun recours n’a été exercé contre la délibération en date du 30 mars 1998 ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 juillet 2005, présenté pour M. Jean-Pierre X ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, par une délibération en date du 13 octobre 1997, le syndicat intercommunal de la Vallée de l’Avre a approuvé la réalisation du projet de travaux de réaménagement de la rivière Avre établi à la suite d’une réunion du 17 mars 1997 ;

que le préfet de l’Eure a déclaré d’intérêt général ces travaux par un arrêté en date du 28 septembre 1998 ;

que, par une délibération en date du 30 mars 1998, le conseil municipal de la commune de Breux-sur-Avre a décidé de répartir sur les propriétaires riverains la part non subventionnable du coût de ces travaux ;

que, par une délibération en date du 7 février 2000, il a décidé de répartir la somme de 50 241,07 francs (7 659,20 euros) sur la base des mètres linéaires de berge des parcelles ;

que, par une délibération en date du 12 janvier 2001, il a décidé des montants de la répartition entre chaque propriétaire riverain de la rivière Avre de la somme de 50 231 francs (7 657,67 euros) ;

que M. X demande l’annulation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d’annulation des trois délibérations prises par le conseil municipal de la commune de Breux-sur-Avre ;

Sur le désistement partiel de M. X  :

Considérant que M. X soutient, dans son mémoire enregistré le 25 mai 2005, qu’il n’a entendu invoquer l’illégalité de la délibération en date du 30 mars 1998 que par la voie de l’exception ;

que, dès lors, ce mémoire doit être regardé comme tendant au désistement de ses conclusions d’annulation de ladite délibération ;

qu’il y a lieu de donner acte de ce désistement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que M. X soutient que le Tribunal administratif de Rouen a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la commune aurait méconnu le principe de l’égalité des citoyens devant les charges publiques ;

que, cependant, le tribunal administratif, en justifiant la mise à la charge de M. X d’une partie du coût des travaux de réaménagement de la rivière Avre par l’application de l’article L. 151-36 du code rural, a implicitement mais nécessairement répondu à ce moyen ;

que, dès lors, M. X n’est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier ;

Sur la délibération du 7 février 2000 :

Considérant que, pour rejeter la demande de M. X qui tendait à l’annulation de la délibération en date du 7 février 2000 par laquelle le conseil municipal de la commune de Breux-sur-Avre a décidé de répartir la somme de 50 241,07 francs (7 659,20 euros) entre les propriétaires riverains de la rivière Avre sur la base des mètres linéaires de berge des parcelles, le Tribunal administratif de Rouen s’est fondé sur ce que cette délibération ne constituait qu’un acte préparatoire insusceptible de recours pour excès de pouvoir ;

que M. X n’invoque en appel aucun moyen sur ce point ;

que, par suite, il n’est pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal administratif a rejeté cette demande ;

Sur la délibération du 12 janvier 2001 :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 151-36 du code rural : Les départements, les communes ainsi que les groupements de ces collectivités et les syndicats mixtes créés en application de l’article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales (...) prennent en charge les travaux qu’elles ont prescrits ou exécutés. Elles peuvent toutefois, dans les conditions prévues à l’article L. 151-37, faire participer aux dépenses de premier établissement, d’entretien et d’exploitation des ouvrages les personnes qui ont rendu les travaux nécessaires ou qui y trouvent intérêt. (...) ; qu’aux termes de l’article 31 de la loi susvisée du 3 janvier 1992 alors en vigueur : (...) les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi que les syndicats mixtes créés en application de l’article L. 166-1 du code des communes et la communauté locale de l’eau sont habilités à utiliser les articles L. 151-36 à L. 151-40 du code rural pour entreprendre l’étude, l’exécution et l’exploitation de tous travaux, ouvrages ou installations présentant un caractère d’intérêt général (...) visant : (...) l’entretien et l’aménagement d’un cours d’eau non domanial (...) la défense contre les inondations (...) ;

Considérant qu’il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment pas du tableau annexé au décret-loi susvisé du 28 décembre 1926, que la rivière Avre située dans l’Eure, dont il est question dans la présente instance, appartient au domaine public fluvial ;

que, dès lors, les dispositions précitées du code rural et de la loi du 3 janvier 1992 sont applicables aux travaux qui y sont réalisés ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’en vertu du paragraphe 2 de l’article 2 des statuts du syndicat intercommunal de la Vallée de l’Avre, celui-ci a pour objet de pourvoir notamment à la défense contre les inondations de la rivière Avre au niveau de diverses communes dont celle de Breux-sur-Avre ;

qu’en application de ces stipulations, il a décidé le 13 octobre 1997 de la réalisation de divers travaux de réaménagement de la rivière dans cette commune ; qu’il a ensuite assuré la maîtrise d’ouvrage de ces travaux ;

que, dès lors, il résulte de la combinaison des dispositions précitées de l’article L. 151-36 du code rural et de l’article 31 de la loi du 3 janvier 1992 qu’il lui revenait de faire participer aux dépenses les personnes qui y trouvaient intérêt  ;

que, d’ailleurs, le second alinéa de l’article 4 de ses statuts précise qu’il pouvait être autorisé à demander de telles participations ;

qu’il s’ensuit que l’ensemble des délibérations par lesquelles le conseil municipal de la commune de Breux-sur-Avre a lui-même décidé de cette participation ont été pris par une autorité incompétente et par suite sont entachées d’illégalité ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande d’annulation de la délibération en date du 12 janvier 2001 ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à la commune de Breux-sur-Avre une somme au titre des frais exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens ;

qu’il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de condamner cette dernière à verser à M. X la somme de 1 500 euros qu’il demande à ce titre ;

qu’il y a lieu, en outre, de la condamner à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés dans la première instance et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de M. X de ses conclusions tendant à l’annulation de la délibération du 30 mars 1998 du conseil municipal de la commune de Breux-sur-Avre relative à la participation des propriétaires riverains au coût d’une partie des travaux de réaménagement de la rivière Avre.

Article 2 : Le jugement n° 0100827 du 21 mai 2004 en tant que le Tribunal administratif de Rouen a rejeté la demande présentée par M. X tendant à l’annulation de la délibération du 12 janvier 2001 du conseil municipal de la commune de Breux-sur-Avre relative à la participation des propriétaires riverains au coût d’une partie des travaux de réaménagement de la rivière Avre et ladite délibération sont annulés.

Article 3 : La commune de Breux-sur-Avre versera à M. X la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.


Commentaire lu sur http://texteau.ecologie.gouv.fr:

Les groupements de collectivités territoriales sont au nombre des personnes morales de droit public habilitées au titre des dispositions de l’article L. 211-7 du code de l’environnement (ancien article 31 de la loi du 3 janvier 1992 sur l’eau) à réaliser les opérations qu’elles énumèrent, en particulier aux lieux et place des propriétaires riverains des cours d’eau non domaniaux. Dès lors qu’une commune, également habilitée à ce titre, a délégué ses compétences à un syndicat intercommunal, celui-ci devient ipso facto compétent, à l’exclusion de la collectivité délégante.