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Publié : 24 janvier 2013

Un moulin fondé en titre n’a pas le droit d’augmenter sa puissance sans autorisation (2005)

Cour Administrative d’Appel de Nancy
Lecture du 17 octobre 2005

...

M. X et la SARL FEE demandent à la Cour :

1°) d’annuler le jugement du 22 janvier 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs trois demandes dirigées contre :

- la décision du préfet de la Meuse en date du 1er février 1999 les mettant en demeure de rétablir une micro-centrale dans les limites de son droit d’eau et le rejet en date du 14 septembre 1999 de leur recours gracieux ;

- l’arrêté du préfet de la Meuse en date du 7 décembre 1999 suspendant leur contrat avec E.D.F. ;

- les décisions du préfet de la Meuse en date du 17 avril 2000, leur refusant l’autorisation d’exploiter une micro-centrale et du 16 mai 2000 rejetant leur recours gracieux ;

2°) d’annuler pour excès de pouvoir ces décisions et le procès-verbal du 13 octobre 1999 ;

3°) de condamner l’Etat à leur verser 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le Tribunal administratif de Nancy a commis une erreur de droit en regardant comme soumise à autorisation une installation fondée en titre dont la consistance légale n’a pas été modifiée ;

- le jugement se fonde sur un fait matériellement inexact concernant la propriété foncière des installations ;

- l’article 4-12 du décret du 15 avril 1981 et l’article 2-12 du décret du 6 novembre 1995 sont illégaux ;

- la sanction prononcée viole le principe de proportionnalité fixé par l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen ;

- cette sanction méconnaît l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 et la directive n° 96/92/CE du 19 décembre 1996 ;

Sur le moyen tiré de ce que l’installation n’était pas soumise à autorisation :

Considérant qu’aux termes de l’article 29 de la loi du 16 octobre 1919 : Les usines ayant une existence légale ... ne sont pas soumises aux dispositions des titres I et IV de la présente loi ;

que si cette disposition dispense les titulaires d’un droit fondé en titre d’avoir à demander une autorisation pour entreprendre des travaux destinés à améliorer le fonctionnement et les performances de leurs ouvrages, elle ne saurait les dispenser d’obtenir une autorisation, dans les conditions prévues à l’article 2 de la même loi, dès lors que lesdits travaux ont pour objet d’augmenter la force motrice dont ils peuvent légalement disposer sur le fondement de leur droit fondé en titre ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal du 3 juin 1988 et de la lettre du préfet de la Meuse en date du 1er février 1999 que les travaux entrepris par M. X ont eu pour effet d’augmenter la puissance de son usine de, 398 kw, puissance reconnue en vertu d’un droit fondé en titre, à 688 kw, infraction pour laquelle M. X a été condamné par la cour d’appel de Nancy à une amende de 20 000 francs ;

que, par suite, le moyen tiré de ce que l’installation n’était pas soumise à autorisation doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de la propriété des installations :

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la date où ont été prises les décisions attaquées, les requérants n’avaient pas apporté la preuve qui leur incombait de leurs droits de propriété sur toutes les parcelles de l’installation et notamment du canal de fuite ;

que, d’ailleurs, le jugement du Tribunal de Grande Instance de Verdun en date du 31 décembre 2001, postérieur à ces décisions, relève que l’élargissement du canal a empiété sur une parcelle appartenant à un tiers et que la propriété des époux X ne comprend pas la berge ni de franc-bord au droit de ladite parcelle ;

Sur l’exception d’illégalité de l’article 4-12 du décret du 15 avril 1981 remplacé par l’article 2-12 du décret du 6 novembre 1995  :

Considérant que les décrets en Conseil d’Etat susvisés, pris en application de l’article 28 de la loi susvisée du 16 octobre 1919, imposent aux demandeurs d’une autorisation d’utilisation de l’énergie hydraulique de justifier qu’ils ont la libre disposition des terrains qu’ils utilisent ;

que ces prescriptions ne sauraient être regardées comme créant une obligation nouvelle contraire aux dispositions de la loi du 16 octobre 1919, dès lors qu’elles concernent des installations fondées en titre mais modifiées ultérieurement comme c’est le cas en l’espèce, compte-tenu du large pouvoir discrétionnaire laissé par la loi à l’administration pour accorder ou refuser l’autorisation ;

Sur le moyen tiré de la violation de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :

Considérant que l’article 6-1 que la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne concerne que les procédures juridictionnelles et ne saurait utilement être invoqué pour contester une sanction administrative telle que la suspension du contrat passé par les requérants avec Electricité de France ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme et des citoyens  :

Considérant que cet article n’énonce aucun principe de proportionnalité de sanctions administratives qui aurait été méconnu par la suspension prononcée par le préfet de la Meuse du contrat d’achat d’énergie par Electricité de France du courant de la micro-centrale en situation irrégulière, en application de l’article 2 du décret susvisé du 7 août 1986 ;

Sur les moyens tirés de la violation de l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 de la direction européenne n° 96/92/CE du 19 décembre 1996 :

Considérant que ces moyens ne sont assortis d’aucune précision permettant à la Cour d’en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que M. X et la SARL FEE ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions tendant à l’allocation des sommes comprises dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X et à la SARL FEE la somme qu’ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. X et de la SARL FORCES ENERGIE ET ELECTRIQUE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. René X, à la SOCIÉTÉ FÉE FORCES ENERGIE ÉLECTRIQUE et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.