Veille Juridique des Riverains de cours d’eau, août 2006
Le canal de fuite d’un moulin est un accessoire indispensable au même titre que le canal d’amenée ou que l’ouvrage construit en travers du cours d’eau dont l’objet est de provoquer artificiellement l’élévation du niveau de l’eau qui par gravité produit l’énergie nécessaire pour faire tourner la roue, le rouet ou la turbine (droit d’accession article 546 du code civil)
Cas particulier d’un canal de fuite dont le terrain jouxtant la rive appartient à une personne autre que le propriétaire du moulin.
Ce cas est malheureusement courant et cette situation est à l’origine de bien des conflits.
La rive du canal s’effondre et le propriétaire du terrain s’insurge en disant que "sa" rive s’est effondrée du fait du passage de l’eau provenant du moulin.
Voyons le cas du propriétaire de ce moulin qui a accepté que la rive soit bornée "au ras de l’eau" par un géomètre expert. Il est évident que ce propriétaire de moulin ne connaît pas ses droits et, en signant ce procès-verbal de bornage, perd son droit de propriété de la rive et notamment du franc-bord.
Il a cependant, du fait que le moulin est fondé en titre et que rien ne doit entraver le fonctionnement dudit moulin, la possibilité de faire mentionner, de préférence à l’amiable par le géomètre ou par une décision de justice, une servitude d’entretien utilisable le long du canal.
Le point de vue du géomètre expert.
Conséquences
Le propriétaire qui vend son moulin dans ces conditions, à savoir un bornage "au ras de l’eau" non conforme au droit des moulins, crée une situation juridique confuse car les tribunaux jugent que le PV s’impose tantôt au nouveau propriétaire tantôt à l’autre. Nous estimons que le PV devrait s’imposer aux deux parce qu’il s’agit de parcelles cadastrales contiguës.
Le point de vue de la VEILLE JURIDIQUE DES RIVERAINS
Comme il est dit précédemment, le PV de bornage peut être contesté par le nouveau propriétaire du moulin par voie judiciaire.
Si le moulin est fondé en titre et si la qualité de moulin est bien écrite dans l’acte notarié de vente, le canal de fuite jouit automatiquement d’une servitude de passage pour l’entretien dudit canal. Rien ne doit entraver ou rendre impossible la marche d’un moulin, même si le bornage est "au ras de l’eau". La contestation doit porter sur l’inscription d’une servitude de passage.
Précaution indispensable à prendre avant l’achat d’un moulin.
Il est évident qu’un acquéreur avisé d’un moulin à eau n’accepte pas d’acheter un moulin dont les terrains n’englobent pas totalement les accessoires du moulin.
Dans le cas contraire, il exige du vendeur du moulin que des servitudes de passage pour la surveillance et l’entretien des accessoires du moulin : barrage et canaux d’amenée et de fuite soient établies entre le propriétaire du moulin et le ou les propriétaires des différents terrains jouxtant les canaux ou le barrage permettant ainsi un accès libre en tous temps pour les besoins du moulin.
L’importance de l’intervention d’un géomètre expert sur la propriété d’un moulin.
Ce qui suit ne concerne pas les moulins dont les canaux et le barrage sont entièrement englobés dans un bloc de parcelles d’un seul tenant. Mais le propriétaire d’un tel moulin peut être tout de même concerné par ce cas s’il possède un terrain jouxtant le canal d’amenée du moulin immédiatement situé en aval !
Dans le cas exposé plus haut, et si un accord a été passé, il faut absolument faire intervenir un géomètre qui bornera le canal litigieux en respectant les francs-bords. Mais cela ne suffit pas comme il a été exposé plus haut : il faut exiger du géomètre que le bornage soit enregistré au cadastre, ce qui le rend opposable aux tiers qui n’ont pas signé le procès-verbal de bornage.
Note importante.
"Le point de vue du géomètre expert" a été rédigé selon les directives d’un géomètre expert diplômé en exercice qui intervient couramment sur des moulins à eau. Il connaît le droit applicable aux moulins. Il a même dicté le paragraphe en caractères italiques
L’intervention d’un géomètre expert dans des litiges portant sur des canaux ou des barrages de moulins est très bon marché par rapport à une procédure judiciaire qui peut aller jusqu’en Cour de Cassation ou devant le Conseil d’Etat selon les cas. Cette intervention peut mettre fin définitivement à un litige qui peut durer pendant des années. Elle est particulièrement recommandée avant l’achat d’un moulin.