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Publié : 8 février 2013

Une condamnation injuste réparée : Exécution sans autorisation de travaux nuisibles au débit des eaux ou au milieu aquatique.(2006)

Exécution sans autorisation de travaux nuisibles au débit des eaux ou au milieu aquatique.

Cour d’Appel de Limoges, arrêt du 20 décembre 2006. VJR, mars 2007.

Par jugement du 15 juin 2006 le tribunal Correctionnel déclare coupable M. Moulineau des faits reprochés et le condamne en répression au paiement d’une amende de 1 500 euros et à un droit fixe de procédure de 90 euros. Appel est interjeté le 22 juin 2006 par le justiciable suivi automatiquement par l’appel du Procureur de la République le même jour mais ce dernier demande toutefois la confirmation de la condamnation à la même amende avec sursis, ce qui laisse supposer un doute dans l’esprit du Procureur quant à la justesse de la condamnation.

Il s’agit d’un cours d’eau non domanial et d’un moulin fondé en titre. "Le fonctionnement de ce moulin, qui remontait à l’époque féodale, avait été interrompu." La brigade départementale du Conseil Supérieur de la Pêche constate le 12 novembre 2003 à la suite de plaintes la réalisation de travaux au sujet de la réfection du barrage de retenue d’eau du moulin, rendue nécessaire par une brèche causée par des crues antérieures. "En aval de la digue, le lit de la rivière avait été décapé sur 200 mètres de long, 20 mètres de large, sur une profondeur de 30 cm, nuisant gravement à l’écosystème aquatique d’après le procès verbal." L’ensemble de ces opérations a été réalisé sans démarche préalable auprès de l’administration. Le droit d’eau serait tombé en désuétude selon les agents qui ont dressé procès verbal pour infraction au code de l’environnement pour le motif cité ci-dessus dans le titre.

Entendu par la gendarmerie, M. Moulineau a contesté l’infraction reprochée, en soutenant qu’il disposait d’un droit fondé en titre comme étant antérieur à 1789 et qu’il n’a fait qu’exercer ce droit en réalisant ces travaux et que du fait de l’existence de ce droit qui ne pouvait tomber en désuétude, même si le moulin n’était plus en état de fonctionner, il n’avait pas d’autorisation administrative à demander. Il s’est contenté de reboucher la brèche qui existait dans la digue du fait des crues anciennes, n’a pas fait de surélévation, ni utilisé aucun matériau venant du lit de la rivière, "les blocs récupérés venant de la digue elle-même et dispersés par le courant à travers la brèche en aval de l’ouvrage et l’obstruction a été faite pour l’essentiel avec des pierres venant d’une carrière voisine … En décapant le lit mineur de la rivière, il n’a fait que le remettre en état en supprimant les sédiments qui s’y étaient déposés au fil des nombreuses crues, provoquant un ensablement et une mise hors d’eau d’une partie de ce lit …Non seulement il n’a pas nui au débit d’eau et à l’écosystème aquatique, mais au contraire, il a rendu une grande surface auparavant asséchée, disponible à la fréquentation des poissons.
En effectuant un curage du ruisseau, il n’a fait que se conformer à la loi aux termes mêmes de l’article L 215-14 du code de l’environnement pour entretenir et rétablir le cours d’eau.
Le droit d’eau du moulin ne s’est pas éteint du fait du non-usage.
L’administration n’apporte pas la preuve qui lui incombe d’une modification de la consistance légale de l’ouvrage tel qu’un rehaussement qui aurait nécessité une autorisation ;
"Il convient de constater l’absence d’éléments matériels constitutifs du délit d’atteinte à l’eau et au milieu aquatique."
De plus, "l’extraction d’alluvions qui fait également partie des travaux d’entretien rendus obligatoires par le texte précité, a été effectué sur une partie sèche, à l’extérieur du lit de la rivière (preuve par photographie datée) et ces travaux ne peuvent donc avoir porté atteinte au cours d’eau et au milieu aquatique, les agents du CSP ayant d’ailleurs eux-mêmes noté la présence à cet endroit de racines d’arbres prises dans les interstices des pierres.

Il résulte de ce qui précède que l’élément matériel de l’infraction n’est pas caractérisé et il convient par conséquent d’infirmer la décision querellée en prononçant la relaxe" de Monsieur Moulineau.
En ce qui concerne l’extraction en partie sèche, l’avocat en charge du dossier a pu argumenter avec plus de poids en ayant en mains l’arrêt de la Cour d’Appel d’AGEN du 18 décembre 2003 confirmant le jugement du TGI d’AUCH n° 466/2003 du 22 mai 2003 qui avait été transmis par un membre de la VJR. Les poursuites avaient été entreprises sur la base des articles L 214-1 et L 214-3 du code de l’environnement (prélèvements effectués sur les eaux superficielles ou souterraines, d’une part, et travaux soumis à autorisation, d’autre part). Or les prélèvements ont eu lieu sur une partie découverte du lit de la rivière et à l’extérieur du lit et vraisemblablement même dans le lit majeur. Le PV a été dressé le 12 novembre, donc en dehors de la période estivale. En effet, la définition du lit mineur ne repose pas sur la notion de surface mouillée à un moment donné.

Nous remarquons que les décisions de justice favorables aux riverains ou aux moulins à eau sont souvent tues d’où l’intérêt de la circulation de cette information.
Pour toute information concernant cette décision, prière de s’adresser à :
Marc Nicaudie, membre de la VJR, 24100 Saint Laurent des Vignes.

Texte revu par MDA le 30 mars 2007.

Veille Juridique des Riverains de Cours d’Eau et des Zones humides.